La mort de Wilford Ferdinand, plus connu sous le surnom de « Ti Will », continue d’alimenter débats et interrogations dans la Cité de l’Indépendance. L’ancien membre du Front de résistance de 2003-2004 a été tué mardi, au volant de son véhicule, en compagnie d’un jeune homme. Cet assassinat suscite de vives réactions, tant l’homme avait marqué la vie sociale et politique des Gonaïves, notamment lors de la chute de Jean-Bertrand Aristide en 2004.
Issu du ghetto des Gonaïves, Wilford Ferdinand était reconnu pour sa capacité à mobiliser les quartiers populaires, mais aussi pour ses méthodes brutales et souvent controversées. Activiste redouté, il ne reculait devant rien pour asseoir son pouvoir ou accumuler de l’argent. « Ti Will » n’était pas un enfant de chœur, et son passé judiciaire le démontre clairement.
En 2007, lors d’une opération conjointe de la Police et de la MINUSTAH, lui et son cousin, Alix Suffrant alias « Bout Zòrèy », furent arrêtés puis condamnés à neuf ans de prison pour l’assassinat du journaliste Johnson Edouard, correspondant de Haïti Progrès et cadre régional du parti Fanmi Lavalas.
Prisons et évasions
Après le tremblement de terre du 12 janvier 2010, Wilford Ferdinand réussit à s’évader du Pénitencier national. Mais loin de se retirer, il poursuivit ses activités. Accusé d’être impliqué dans le meurtre de la jeune Francesca Gabriel (12 ans) en 2004, arrêté à Dajabon en 2012, puis de nouveau condamné en 2014, il recouvrit finalement la liberté grâce à une grâce présidentielle accordée par Michel Martelly.
Son nom resta toutefois associé à plusieurs scandales : détention illégale d’armes, affaires de vol, altercations violentes et conflits fonciers dans la région de l’Artibonite, qu’il cherchait à contrôler.
Malgré ses multiples démêlés judiciaires, Wilford Ferdinand demeurait une figure influente. Il participa à des manifestations contre l’ancien Premier ministre Ariel Henry, et continua d’incarner pour certains un symbole de contestation du pouvoir central. Depuis la chute de Jean-Claude Duvalier en 1986, les Gonaïves ont souvent été le théâtre de mobilisations décisives, et « Ti Will » s’était imposé comme l’un des acteurs majeurs de ces mouvements.
Son assassinat relance aujourd’hui les tensions dans la commune des Gonaïves. Des manifestants accusent le nouveau directeur départemental de la PNH dans l’Artibonite, Jacques Ader, de liens indirects avec cette affaire. Certains avancent même que « Ti Will » entretenait des rapports avec les gangs de la région. La Police des Gonaïves, pour sa part, n’a pas encore communiqué officiellement sur ces accusations.
Avec la disparition de Wilford Ferdinand, c’est un chapitre à la fois sombre et marquant de l’histoire récente des Gonaïves qui se referme, laissant la ville partagée entre soulagement, inquiétude et incertitude.
Rédaction / Monopole














