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Le Ministère des Finances : Bouc émissaire ou victime d’un système ?

Crédit photo: Le Ministre des Finances Alfred Metellus Président une réunion stratégique du Ministère

Le Ministère des Finances : Bouc émissaire ou victime d’un système ?

Crédit photo: Le Ministre des Finances Alfred Metellus Président une réunion stratégique du Ministère

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Les accusations de lenteur dans les décaissements budgétaires pèsent lourdement sur le gouvernement haïtien, avec le ministère des Finances souvent pointé du doigt. Récemment, le coordonnateur du Conseil Présidentiel de Transition (CPT), Monsieur Fritz Alphonse Jean, a publiquement déploré la lenteur des décaissements concernant son “budget de guerre”, soulevant des questions légitimes sur la responsabilité de chacun dans cette problématique persistante. Mais faut-il vraiment accabler uniquement le ministère des Finances ? Une analyse plus approfondie révèle une situation plus complexe, où les faiblesses internes à l’administration publique jouent un rôle tout aussi crucial.

 

La question centrale qui émerge des déclarations de M. Jean est la suivante : les dossiers de décaissement, même pour des priorités nationales, sont-ils préparés avec la rigueur requise ? L’une des faiblesses structurelles de l’administration haïtienne réside en effet dans sa capacité limitée à rédiger des programmations et des justificatifs conformes aux exigences pour faciliter les dépenses publiques. Il est permis de se demander si le Président du CPT, malgré son expertise d’économiste, dispose des équipes et des procédures adéquates pour monter des dossiers financièrement irréprochables.

 

Plusieurs ministres se plaignent régulièrement des lenteurs de décaissement, un refrain bien connu dans l’administration haïtienne. La responsabilité du ministère des Finances est indéniable en tant que gardien des deniers publics et entité chargée de valider et d’exécuter les paiements. Cependant, cette responsabilité est partagée. Les exigences en matière de documentation, de conformité et de transparence sont strictes, et elles visent à prévenir la mauvaise gestion et la corruption. Si les dossiers soumis au ministère des Finances sont incomplets, mal justifiés ou non conformes aux procédures établies, il est normal que leur traitement soit ralenti, voire suspendu.

 

Il est important de rappeler qu’il fut un temps où les étapes de décaissements étaient excessivement nombreuses et complexes, rendant le processus extrêmement long. Sous l’administration Préval, des efforts avaient été faits pour réduire ces étapes et fluidifier les procédures. Malgré ces allègements, la bureaucratie haïtienne reste une source majeure de frustration. Les “grandes réunions avec toute la chaîne de commande” censées faciliter l’avancement des dossiers urgents pour le président, tout en laissant les autres suivre un “lourd cours bureaucratique”, soulignent un manque de systématisation et d’efficacité générale. Ce processus à deux vitesses aboutit parfois, en fin d’année budgétaire, à des remises à l’État de fonds non dépensés, faute de décaissements en temps voulu.

Un facteur aggravant est le manque de familiarité de nombreux administrateurs avec les démarches administratives de la fonction publique. Souvent, des fonctionnaires, même bien intentionnés, se retrouvent perdus face aux exigences documentaires et procédurales. Cela entraîne des allers-retours incessants entre les entités, des corrections répétées et, in fine, des retards significatifs.

 

Les fonctionnaires, souvent bien connus pour leurs pratiques, cherchent par divers moyens à contourner les procédures, motivés par la corruption et le gaspillage. Un ancien responsable de l’État a dénoncé le fait que certaines personnes, parachutées dans l’administration, n’y sont que pour s’enrichir, sans aucune volonté de servir les citoyens. Elles recourent à toutes sortes de manœuvres pour mener à bien leurs méfaits. Par exemple, elles jugent fastidieux le processus de décaissement des fonds, alors qu’une simple planification deux ou trois mois à l’avance suffirait.

 

Si le ministère des Finances doit certainement faire preuve de diligence et d’efficacité dans le traitement des dossiers, il serait injuste de lui faire porter l’entière responsabilité des retards de décaissements. Une réponse transparente du ministère des Finances sur les goulots d’étranglement spécifiques et les exigences non satisfaites pourrait éclairer davantage la situation. Il est impératif que toutes les entités de l’État haïtien travaillent de concert pour renforcer leurs capacités internes à monter des dossiers conformes et à maîtriser les procédures administratives. Sans cette amélioration globale, les plaintes de lenteur persisteront, quelles que soient les bonnes volontés affichées.

 

DSB/Monopole

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