Malgré l’incertitude persistante entourant la tenue des prochaines élections, le Conseil électoral provisoire (CEP) vient de renouveler sa direction. Un nouveau bureau a été installé au cours du weekend, avec à sa tête Jacques Desrosiers, représentant de la presse, désormais président du CEP.
Après plusieurs mois de blocages et de planifications avortées, Patrick St-Hilaire a été écarté de ses fonctions. Le nouveau bureau hérite d’une mission cruciale : organiser le référendum constitutionnel et les élections générales avant la date butoir du 7 février 2026. Toutefois, de nombreux observateurs estiment qu’au vu de l’insécurité et du manque de préparation logistique, seul un miracle permettrait de respecter ce calendrier.
Le Conseil présidentiel de transition et le gouvernement misent actuellement sur la diplomatie pour obtenir un délai supplémentaire, tout en cherchant à contenir la violence des gangs. Ces derniers contrôlent une grande partie de la capitale et étendent leur emprise dans plusieurs villes de province, compliquant toute perspective d’organisation électorale sereine.
La nomination de ce nouveau bureau illustre les tensions internes au sein du CEP, dont les membres restent divisés sur les moyens à déployer pour atteindre les objectifs fixés.
Aux côtés de Jacques Desrosiers, la nouvelle équipe dirigeante est composée de Jaccéus Joseph, vice-président, Nemrod Sanon, trésorier et Peterson Pierre-Louis, secrétaire.
Le CEP, ancienne version, a déjà lancé plusieurs initiatives, notamment la mise en place des Bureaux de Distribution de Cartes (BDC) et des Bureaux de Recensement (BCR) à travers le pays. Mais l’efficacité de ces structures demeure incertaine, compte tenu de la crise sécuritaire et institutionnelle.
Le grand défi du nouveau CEP reste la restauration du processus démocratique. Haïti n’a pas organisé d’élections depuis octobre 2018, date des dernières élections partielles pour le Sénat. Depuis, toutes les échéances électorales ont été reportées ou annulées. Les conséquences sont visibles :
- Le Parlement est dysfonctionnel depuis janvier 2020, faute d’élections législatives.
- Les municipalités sont dirigées par des agents intérimaires désignés par l’exécutif, en remplacement des maires élus dont le mandat a expiré.
- Les ASEC et CASEC, structures locales de gouvernance, sont également inexistants, laissant un vide institutionnel dans les sections communales.
Ainsi, le pays se trouve dans une situation où aucune autorité politique élue n’est en fonction, ce qui affaiblit la légitimité des institutions et nourrit une profonde crise de confiance entre l’État et la population.
Pour l’instant, l’attention est tournée vers le référendum constitutionnel, dont le projet a déjà été transmis aux conseillers-présidents. Ces derniers sont chargés d’en faire la promotion et d’ouvrir le débat public avant de soumettre le texte au verdict des urnes.
La population devra alors décider s’il est nécessaire de remplacer la Constitution de 1987 amendée, jugée par certains comme un frein à la stabilité politique, mais considérée par d’autres comme l’un des derniers remparts démocratiques du pays.
La question demeure : Jacques Desrosiers réussira-t-il là où son prédécesseur a échoué ? La réponse dépendra non seulement de la capacité du CEP à préparer techniquement les élections, mais aussi de la volonté politique des acteurs nationaux et du soutien de la communauté internationale face aux défis sécuritaires et logistiques.
En attendant, les Haïtiens continuent de vivre dans une transition politique sans fin, marquée par un vide institutionnel inédit depuis 2018 et par l’incertitude quant à l’avenir démocratique du pays.
La Rédaction / Monopole














